Dans « The catcher and the Rye », Holden en passant près du lac de Central Park, se pose une question « Où vont les canards quand le lac est gelé ? ».
J’ai la réponse.
À Berlin, l’hiver frimait à mort, avec -14, pas de soleil, 20 cm de neige au sol, encore moins de S-Bahn que d’habitude et les avions d’Air Berlin qui faisaient de la luge. Je me baladais le long du Landwehrkanal, suivant une maman qui tirait une luge, sur laquelle un bambin emmitouflé chantait. Soudain, sa moufle gauche pointant vers l’Admiralbrücke, il se redressa et cria « maman, maman des vampires ! » La maman ne se retourna même pas, elle lui dit par dessus l’épaule « Des vampires ! Je crois que je vais te changer de Kita ! Qu’est-ce qu’ils te mettent dans la tête ».
On dit que la vérité sort de la bouche des enfants. Je m’approchais du pont, l’été il est plein de clients de la pizzéria Casolare, mais l’hiver il est plein de vide. Enfin, pour être plus précis, à part la petite dame qui vend la Berliner Zeitung, assise sur sa chaise pliante, le pont était vide et très calme. Un silence idéal pour des chauves-souris.
L’enfant avait raison. Des centaines de chauves-souris géantes, des vampires donc, s’étaient agglutinées au plafond du pont. Une masse compacte, noire et mouvante qui aurait effrayé n’importe qui d’autre que moi, mais Auvergnat de naissance, j’allais pas me laisser impressionner par quelques… volatiles.
Et justement, si le terme de volatile est, pour des animaux de l’ordre des chiroptères, zoologiquement approximatif, le son qu’ils émirent, quand ma présence les dérangea, n’était autre que Coin Coin. Ce fameux Coin Coin, qui permet aux Parisiens, ignares des choses de la nature, d’identifier le canard à coup sûr.
Coin Coin firent les volatiles, dont les pattes palmées avaient adhéré à la brique glacée du pont.
Cette situation s’explique très simplement. Les canards, fatigués de marcher sur le canal gelé, recherchaient un peu de chaleur, de cette chaleur que la brique accumule. Ils se jetèrent donc, palmes en tête contre le plafond du pont. Mais avec les températures actuelles, la brique était glacée et leurs pattes s’y collèrent, les obligeant à rester la tête en bas jusqu’à ce que la température remonte… et qu’eux retombent. C’est comme ça que je les trouvais ce jour.
Voilà où sont les canards lorsque le lac est gelé. Sous les ponts. Mais à l’envers.
Et les cygnes alors, où sont-ils ?
Au moment où j’écrivais ce texte, le 27 janvier 2010, J. D. Salinger, L’auteur de The catcher and the Rye, décédait… J’ose n’y voir aucune relation de cause à effet.
La photo qui illustre ce billet montre plus de cygnes que de canards, cela confirme bien ce que je raconte, les canards sont sous l’Admiralbrücke.
2 Responses
wow !
Soit faut que tu fasse péter un photo de ces canards la tête en bas, soit y faut que tu fasse tourner s’que tu fume.
Excellent, je passe devant persque tous les jours, il va falloir que j’aille voir.